« L’épisode de canicule qui a touché notre pays rappelle l’urgence à agir contre les dérèglements climatiques. On a vu, en quelques jours, combien nous étions vulnérables à de tels épisodes météo extrêmes : pics de pollution, perturbations des réseaux électriques et ferroviaires, incendies de récoltes, destruction de biodiversité… La conférence climat – la COP 21 – qui aura lieu en fin d’année à Paris sera une étape importante de la mobilisation internationale. Enjeu : limiter le réchauffement de la planète à 2 degrés maximum, au-delà desquels le climat serait incontrôlable.
Agir est donc un impératif. Et nous y avons d’autant plus intérêt que le véritable moteur de création durable d’emplois est dans la transition écologique de nos économies, de nos modes de vie, de transport ou de production d’énergie… Pour l’engager, un éventuel accord international ne sera pas suffisant. L’objectif, c’est la mobilisation de tous, au plus près des territoires, pour nourrir des solutions adaptées à leurs réalités. Et sans attendre 2030 ou 2040.
C’est cette exigence que nous porterons dans la campagne des prochaines élections régionales. Car non seulement les solutions écologistes sont possibles et réalistes, mais elles constituent, par surcroît, une chance à saisir pour la Normandie, en termes de création d’emplois comme de qualité de vie. Une chance, aussi, pour recoudre une société déchirée. La transition écologique, c’est une politique qui ne laisse pas les plus fragiles au bord du chemin, c’est une opportunité de ré-industrialisation qu’il convient de saisir.
Pour y parvenir, reste à assumer des choix courageux. D’abord, se libérer de la dictature du court terme qui nous confronte à des choix binaires : ne rien faire ou renverser la table. La transition écologique ne se fera pas en six ans d’un mandat régional, ni même en deux. C’est un défi pour les trente ans devant nous – même si, encore une fois, ces effets bénéfiques pourront être plus vite constatés. Face aux enjeux climatique (le réchauffement) et énergétique (des ressources qui s’épuisent et qui seront plus chères), il n’y a ni solution de facilité ni raccourci possible. Ceux qui disent le contraire, promettant le redémarrage de l’économie à coup de propositions simples, au mieux se trompent, au pire nous trompent.
Au moment où s’achève l’utile débat public sur le projet éolien offshore du Tréport, il est permis d’escompter que la réalisation de ce parc et de ceux de Fécamp et de Courseulles-sur-Mer, mettront la Normandie en pôle position dans ce domaine. Si, dès 2016, nous engagions pleinement la transition écologique, la Normandie pourrait à l’horizon 2050 – date de référence des scénarios internationaux sur le climat – avoir divisé par deux ses consommations d’énergie, contribuant ainsi à la lutte contre le réchauffement, tout en assurant la totalité de ses besoins en électricité à partir d’énergies renouvelables.
D’abord, réduire nos consommations d’énergie : l’énergie la moins coûteuse, c’est celle qu’on ne consomme pas. La Région engagera un programme de rénovation systématique de l’habitat ancien et des locaux d’activité, à raison de 40 000 logements par an et 2,8 millions de m² de locaux. En mobilisant propriétaires, artisans et entreprises du bâtiment, architectes et collectivités locales, on y parviendra. Potentiel de création d’emplois : 14 000 à 20 000 emplois pérennes en Normandie. Chiffre d’affaires pour la filière bâtiment : 2 milliards d’euros par an. Le dispositif ? Financé par les économies d’énergie réalisées, la Région n’engageant que des avances remboursables.
En aidant les entreprises à rendre plus efficaces leurs process de production, on aide à alléger leur facture énergétique. Gain énergétique, gain économique. À cet effet, la Région créera un fonds d’investissement pour l’efficacité énergétique, doté de 100 millions d’euros par an, là aussi sous forme d’avances remboursables.
Réduire nos besoins de consommations, donc, mais aussi pourvoir aux besoins restants par les énergies renouvelables. Là aussi, c’est possible. Une étude récente de l’Ademe [Agence pour le développement et la maîtrise de l’énergie] montre que le potentiel normand de production électrique renouvelable est très nettement supérieur aux besoins : 51 GigaWatt (GW) d’électricité renouvelable (principalement d’origine éolienne et solaire) soit l’équivalent de 31 réacteurs nucléaires EPR ! Ça ne se fera pas tout seul, mais ça ne coûtera pas plus cher que le maintien du mixte actuel nucléaire et énergies fossiles.
Le problème n’est pas le coût, mais les choix. On peut décider, dès maintenant, de s’engager, pour notre région, dans une stratégie durable de production énergétique locale, sans impact pour l’environnement et la qualité de vie, sans risque majeur pour les populations et qui ne contribue pas, via des importations massives, au déficit de la balance commerciale, le tout avec à la clef 13 000 emplois pérennes dans la production et les services liés.
Changer de modèle de production et de consommation d’énergie, c’est au total un minimum de 30 000 emplois durables qui peuvent être créés en Normandie. Et on ne parle même pas des emplois potentiels si l’on engage la transition écologique dans les autres secteurs : l’industrie, l’agriculture, les transports… On ne parle là, non plus, des emplois induits ni des bénéfices attendus pour les finances publiques et les organismes sociaux. Ces chiffres ne sont pas un mirage, ils sont extraits d’études fouillées, indépendantes et de référence. Ils disent bien que le souci de l’environnement ne s’oppose pas à la bonne santé de l’économie.
Alors ? C’est à nous de décider. Soit de continuer comme avant, sans guère de perspective de voir la situation s’améliorer comme par magie. Soit engager sérieusement la transition – maîtrisée, sécurisée, protectrice de chacun, mais assumée et profitable à tous ».
Les contributeurs : Yanic Soubien, tête de liste « Normandie Écologie » pour les élections régionales 2015 : Caroline Amiel (tête de liste dans le Calvados), Perrine Hervé-Gruyer (Eure), François Dufour (Manche), Claude Taleb (Seine-Maritime).
On ouvre le débat
Décidés à partir en autonomie au premier tour des élections régionales des 6 et 13 décembre 2015, les écologistes appellent à une véritable transition écologique, source, selon eux, de milliers de créations d’emploi dans la région. Si cette transition écologique était engagée dès l’année prochaine, la Normandie diviserait par deux sa consommation en énergie d’ici à 2050 selon Europe Ecologie-Les Verts.