Par Nadine Rozel, commerçante et militante écologiste
Une année se termine, la plupart des commerçants ont été fermés 3 mois et certains comme les bars et restaurants ont dû fermer dès le début du couvre-feu et annonce 7 mois de fermetures…
Les mouvements sociaux depuis la fin d’année 2018 ont fortement affecté l’activité du commerce en centre-ville. Dans ce contexte particulier, souvent difficile n’oublions pas que le commerce est à la fois un acteur économique et un facteur de lien social et d’animation de la ville. Il joue un rôle essentiel dans l’équilibre des relations humaines au quotidien.
Une étude publiée par CBRE, cabinet expert en immobilier commercial, indique que Le Havre présente le plus haut ratio national de m² de centres commerciaux soit 561 m² pour 1 000 habitants contre 276 m² pour 1 000 habitants en moyenne en France.
Nous disposons de 5 centres commerciaux qui vont de pair avec une diminution des zones de chalandises !
La difficulté locale dépend aussi de sa position géographique.En effet, on ne passe pas au Havre, on y vient et pour ce faire, on emprunte un pont payant ou l’autoroute payante aussi, il est difficile d’attirer des clients normands séparés par la Seine, surtout depuis l’installation de la zone commerciale au pied du pont de Normandie, qui retient de ce fait aussi la clientèle populaire parisienne.
Les grandes enseignes de marques haut de gamme rechignent à s’installer au Havre, le pouvoir d’achat n’est pas extensible, et la clientèle au fort potentiel d’achat est vieillissante.
un paradoxe existe pourtant, quand ces centres commerciaux arrivent, les élus locaux valident souvent les projets, porteur de création d’emplois. Dans une agglomération comme le Havre, où le taux de chômage est important, on comprend bien que la promesse de créer des centaines de postes soit tentante. Mais dans ces mêmes zones, les habitants n’ont de fait pas le pouvoir d’achat pour satisfaire l’augmentation de leurs désirs de consommation.
N’oublions pas qu’un poste créé en centre commercial en supprimera 2 voire 3 en centre ville.
Or, sauf si on estime qu’on va attirer des consommateurs sur un plus large rayon, on reste sur la même population et l’offre arrive à saturation. Les gens savent déjà où ils doivent aller s’ils veulent trouver telle ou telle marchandise.
Les grands emplacements en centre ville existent, plusieurs boutiques fermées côte à côte depuis des années ou en prévision de fermeture (le printemps dans un court terme) pourrait être des espaces pour des enseignes actuellement excentrées, telles l’art créatif, le bricolage, le luminaire etc.
Cette crise sanitaire a désorienté une majorité de petits commerçants.
On nous impose une fermeture pour ensuite nous proposer une aide à hauteur de 500€ pour installer un site et on nous « rabache » à longueur de journée de faire du « click & collect ».
Sauf que ce n’est pas notre métier de faire des paquets, de les poster ou les distribuer.
Notre coeur de métier, c’est la proximité, le conseil, la relation humaine. Le plaisir de faire une vitrine de créer un centre ville vivant font partie des côtés positifs du commerce indépendant.
Vous imaginez des locaux transformés en réserve avec un employé sur écran et l’autre entrain de faire des paquets ? Allons nous devenir tous des minis Amazon ? Avec aussi le risque d’une monnaie virtuelle qui s’installe à la vitesse grand V.
Le commerce local semble tirer son épingle du jeu, point positif de ses dernières restrictions temporelles et kilométriques. Des personnes en télétravail ou confinées ont choisi l’option de la proximité pour les achats de produits frais et découvrent des producteurs dans un rayon raisonnable. Les citadins sont aussi de plus en plus concernés, leurs présences sur les marchés en témoignent. Pour les producteurs de la région la compensation du manque de ventes en restauration n’est pas atteinte. Les prises de consciences pour consommer mieux en limitant les intermédiaires s’installent doucement mais sûrement.